Ludovic Carème se passionne pour la photographie dès le lycée, en lisant les reportages du journal Libération dans le R.E.R au début des années quatre-vingt. Il suit des études de photographie à l’ETPA de Toulouse et publie sa première photo dans Libération en 1995. Sur une idée de Jean Hatzfeld, il fait des portraits de couples de réfugiés échappés de l’horreur à Srebrenica. Cette première expérience lui transmet l’urgence de témoigner de l’injustice et de la fragilité humaine avec son Rolleiflex 6X6 ou son Hasselblad. Son style sensible, à la fois contemporain et ancré dans la tradition des portraitistes avec ses portraits des sans-papiers maliens en grève de la faim de l’église Saint-Bernard, les actions d’Act-Up ou encore les esclaves haïtiens des plantations de cannes à sucre en République Dominicaine. Son regard fait ressortir le drame des vedettes et la splendeur des vaincus.

En 2007, Ludovic Carème s’installe à São Paulo pour changer radicalement ses habitudes et se recentrer sur la photographie documentaire. Il explore une favela condamnée à la destruction par la spéculation immobilière et confronte le quotidien de ses habitants en sursis sur une période de plus de 2 ans. Ce travail personnel qui prend le nom de la favela « Agua Branca » l’incite à s’enfoncer plus profondément dans la faille qui sépare la classe dominante blanche avec ses immeubles vides et ses victimes. Les moins chanceux limitent leur habitat à une bâche ou une couverture qui forment de tristes « cocons » rejetés sur l’asphalte du vieux centre de São Paulo. Ludovic Carème remonte les courants jusqu’à la région de l’Acre, là où naissent les sources qui alimentent jusqu’aux grand fleuves amazoniens, à la rencontre des « Seringueiros », les récolteurs de caoutchouc. Ces descendants de paysans miséreux du Nordeste, envoyés par les autorités vers la forêt amazonienne pour reprendre la production de caoutchouc au début de la seconde guerre mondiale, se sont souvent mélangés avec les indiens Kaxinawas, Asháninkas, Jaminawas et ont aussi été exploités et décimés - aujourd’hui quelques tribus vivent encore en harmonie avec la forêt grignotée par ces descendants des soldats du caoutchouc, aujourd’hui manipulé par la puissance de l’industrie agro-alimentaire.